Deux avions américains étaient en mission de routine lorsqu’un missile est soudainement sorti de nulle part

Publié le 09/03/2021

Une opération à haut risque

Nous sommes le 19 août 1981 et deux F-14 Tomcats – des chasseurs à réaction américains haut de gamme – patrouillent dans le ciel au-dessus du golfe de Sidra au large de la Libye. Devant eux se trouvent deux Fitters SU-22 libyens. Les Tomcats se déplacent vers eux. Quand soudain, l’un des Fitters lâche un missile Atoll et ce qui aurait dû être une interception de routine se transforme en opération à haut risque.

Une Opération À Haut Risque

Une Opération À Haut Risque

La mission était d’avertir

Les F-14 n’ont pas d’autre but que d’avertir les Fitters. C’est la mission du jour : faire savoir aux Libyens qu’ils s’engagent dans une zone où ils feront face à des tirs s’ils ne reculent pas immédiatement. Mais en un éclair, un missile est tiré dans les airs vers l’avion américain de tête, et les Top Guns de la marine américaine se retrouvent alors dans une véritable situation de « combat ou fuir ».

La Mission Était D’avertir

La Mission Était D’avertir

Des avions de chasse

Les Tomcats et les Fitters sont tous deux ce qu’on appelle des chasseurs à ailes oscillantes. Et ces types d’avions n’ont jamais été engagés dans des combats les uns contre les autres – avant aujourd’hui. De plus, le Tomcat seul, ne s’est jamais retrouvé dans un combat aérien auparavant. Mais le premier problème du chef d’escadron ici est qu’il y a un missile Atoll qui se dirige vers lui à toute vitesse, et ce combat, qui est le premier du genre, pourrait être terminé avant même d’avoir commencé…

Des Avions De Chasse

Des Avions De Chasse

La mission dans le Golfe de Sidra

Les Tomcats se trouvaient dans le golfe de Sidra pour un exercice dit de « liberté de navigation ». Il s’agit d’une opération militaire dans laquelle des navires et des avions américains démontrent leurs droits à se déplacer en vertu du droit international. Ils démontrent ce droit en allant à l’encontre de revendications d’autres pays sur les eaux internationales – revendications qui sont de fait, considérées comme excessives. L’appréciation du niveau d’ « excessif » dépend des eaux internationales dont il est question.

La Mission Dans Le Golfe De Sidra

La Mission Dans Le Golfe De Sidra

Défendre son droit à naviguer dans les eaux internationales

Les États-Unis souhaitaient montrer aux Libyens que, dans ce cas de figure, ils défendraient le droit de naviguer en Méditerranée. Ils ont donc envoyé dans la région une taskforce qui comprenait des super transporteurs U.S.S. Nimitz  et U.S.S. Forrestal. Chacun des porte-avions abritait des dizaines d’avions et d’hélicoptères, dont les F-14.

Défendre Son Droit À Naviguer Dans Les Eaux Internationales

Défendre Son Droit À Naviguer Dans Les Eaux Internationales

L’avion F-14

L’avion F-14 est né de la nécessité pour un avion d’être la principale défense d’un groupe de navires de guerre, ou de « porte-avions ». Si un ennemi décidait d’envoyer des bombardiers pour attaquer les navires de guerre, le Tomcat se démènerait alors et utiliserait sa vitesse et sa puissance pour les combattre de loin, ne leur permettant jamais de s’approcher des porte-avions.

L’avion F 14

L’avion F 14

Des spécifications techniques impressionnantes

Et ils étaient rapides ! Le pilote d’essai et concepteur du F-14, un dénommé Charlie Brown, a déclaré au site web Popular Mechanics en mars 2021 : « Les spécifications [de la Marine] ont demandé du Mach 2,34 [plus de deux fois la vitesse du son]. Dans les faits, nous avons testé l’avion pour du Mach 2,5 [encore plus rapide]. Lorsque vous pilotez un Phantom, l’avion est conçu pour voler à du Mach 2.0, mais lorsque vous volez à cette vitesse, c’est comme être assis sur un ballon de plage ; vous ne savez pas dans quelle direction l’engin va aller, tellement il est sensible. Par contre dans un F-14, c’est comme s’asseoir dans une Cadillac. »

Des Spécifications Techniques Impressionnantes

Des Spécifications Techniques Impressionnantes

Un avion meurtrier

Proposant une gamme étendue équipée d’un ensemble technologique puissant, il ne valait mieux pas se frotter à cette bête aérodynamique des airs. Le pilote Paco Cherici avait à ce propos déclaré à Popular Mechanics : « Le Tomcat était un avion massif construit autour d’un puissant radar, et spécialement conçu pour tirer dans les airs le missile le plus meurtrier de ce qui existe en occident, l’AIM-54 Phoenix. »

Un Avion Meurtrier

Un Avion Meurtrier

Un avion mis au premier plan dans le film Top Gun

Un avion aussi redoutable que celui-ci allait forcément attirer l’attention du public. Et lorsque les pilotes de F-14 se sont retrouvés, en 1986, au centre du film à succès Top Gun, ils sont devenus de vraies stars. Après la sortie du film, la marine a été submergée par des demandes de jeunes américains qui voulaient servir en tant que pilotes d’avions de chasse et piloter leur propre Tomcat.

Un Avion Mis Au Premier Plan Dans Le Film Top Gun

Un Avion Mis Au Premier Plan Dans Le Film Top Gun

Des règles strictes dans l’armée de l’air

Toutefois, avec ce genre de puissance et de pouvoir à portée de main, il fallait savoir garder la tête froide. Il y avait aussi des règles très strictes au sujet de l’engagement dans l’armée de l’air. Ainsi, en août 1981, les pilotes de chasse savaient clairement quelles étaient les leurs. Ils n’étaient pas en guerre, donc ils n’étaient pas là pour débuter quoi que ce soit. Cependant, ils n’avaient pas besoin d’aucune permission pour riposter s’ils étaient sous les tirs adverses.

Des Règles Strictes Dans L’armée De L’air

Des Règles Strictes Dans L’armée De L’air

L’aviation libyenne

Donc si la situation devenait problématique pour eux, les aviateurs américains savaient pertinemment qu’ils allaient retrouver face à eux des adversaires forts et bien armés. Les Libyens avaient leurs propres avions, notamment des appareils de fabrication soviétique allant du MiG-25 Foxbat capable de Mach 3 au lourd Su-22 Fitter et aux chasseurs Français, les Mirage 5D et F.1.

L’aviation Libyenne

L’aviation Libyenne

Le Sukhoi Su-22

Les avions face auxquels les Tomcats se sont retrouvés étaient des Sukhoi Su-22. Ces avions étaient faits pour se déplacer rapidement à faible altitude. Ils n’étaient donc pas vraiment les meilleurs engins pour affronter des Tomcats. De plus, ces bombardiers n’avaient pas de radar, ce dont ils auraient pourtant eu besoin pour affronter l’ennemi dans un combat aérien moderne. Au lieu de cela, ils étaient équipés à l’avant d’un laser de ciblage au sol.

Le Sukhoi Su 22

Le Sukhoi Su 22

Un avion petit mais puissant

Pourtant, ces avions de conception soviétique étaient populaires dans le monde entier, en particulier parce que les ailes de balayage dont ils étaient équipés ne nécessitaient qu’une petite piste pour le décollage. Avec un moteur puissant et une gamme complète d’équipements électroniques, il ne s’agissait pas ici d’avions de débutants, même si les systèmes embarqués étaient là pour assister le pilote pour naviguer et bombarder.

Un Avion Petit Mais Puissant

Un Avion Petit Mais Puissant

Un avion menaçant

Et le Su-22 pouvait transporter une gamme complète de bombes et de missiles de différentes tailles, ce qui en faisait une menace pour les navires de guerre. Bien qu’il soit axé sur le bombardement, il pouvait également servir dans la reconnaissance aérienne. C’est donc sur ces avions que le choix s’était porté pour déterminer l’emplacement de la taskforce américaine.

Un Avion Menaçant

Un Avion Menaçant

Les tentatives libyennes

Pourtant, lorsque les Libyens ont essayé une première fois en 1981 de s’attaquer aux appareils de défense des porte-avions américains, ils ont utilisé un avion différent des Su-22. Ils ont envoyé des MiG-25 à la place. Il n’a pas fallu longtemps avant que ceux-ci ne soient chassés par les avions américains qui protégeaient les deux navires de guerre, en ce compris – mais pas uniquement – des F-4J Phantom, mais aussi des F-14. Et ce n’était que le début.

Sans Titre

Les tentatives libyennes

Le plan des libyens

Mais que faisaient exactement les Libyens ? Eh bien, ils cherchaient à savoir où se trouvaient les porte-avions américains. Et les avions de l’armée américaine agissaient comme des pointeurs, les informant de l’endroit où ils se trouvaient via l’espace aérien. Tout au long de la journée du 18 août 1981, les Libyens ont envoyé deux par deux des avions, 35 duos en tout. Et toute la journée, les Libyens et les Américains se sont pourchassés dans le ciel au-dessus du golfe.

Le Plan Des Libyens

Le Plan Des Libyens

Les escadrons « Fast Eagle »

Les porte-avions américains ont de nouveau envoyé leurs avions dans les airs le lendemain. Parmi ces avions se trouvaient deux Tomcats de l’escadron VF-41, surnommés les « Black Aces ». Ces avions ont décollé du pont du Nimitz. Et compte tenu de leur rythme de vol et de la puissance de ces F-14, ils avaient pour indicatifs d’appel « Fast Eagle 102 » et « Fast Eagle 107 ».

Les Escadrons « Fast Eagle »

Les Escadrons « Fast Eagle »

Un vol de patrouille qui tourne au cauchemar

Leur vol de patrouille s’est, au départ, déroulée sans incident majeur. Mais cette situation allait bientôt changer. Les pilotes à bord des avions aller voir leur entraînement mis à rude épreuve. Les pilotes en question étaient, dans Fast Eagle 102, Henry « Hank » Kleemann – accompagné par Dave Venlet au radar – le commandant de mission, et Larry « Music » Muczynski aux commandes du Fast Eagle 107 – aux côtés de James Anderson au radar.

Un Vol De Patrouille Qui Tourne Au Cauchemar

Un Vol De Patrouille Qui Tourne Au Cauchemar

Henry Kleemann

Henry Kleemann, originaire des vastes terres du sud de l’Illinois, avec initialement un peu d’embonpoint. Mais l’entraînement à l’académie navale lui avait rapidement fait perdre les quelques kilos en trop. Bagarreur et fort, il était aussi intelligent que musclé. Et il s’était fait un nom en faisant un parcours sans faute et sans trop d’efforts pour devenir pilote.

Henry Kleemann

Henry Kleemann

Larry Muczynski

Larry Muczynski quant à lui, n’était pas né pour être pilote. Il ne l’a envisagé que lorsqu’il est entré dans la Marine. Mais une fois ce projet en tête, il a tout fait pour atteindre son but. En 1981, il opérait la transition de Phantoms à Tomcat. Il en était fier, déclarant au site web du Museum of Flight en 2018 : « C’était un honneur d’obtenir un Tomcat. » Avec le changement d’avion est venu un changement de navire, et il en profitait, bien que la nourriture sur le Nimitz laissait à désirer.

Larry Muczynski

Larry Muczynski

Le début de la catastrophe

Interviewé par Bert Kinzey pour son livre F-14 A et B Tomcat in Detail and Scale, Larry Muczynski a décrit ce qui s’était passé dans le Golfe ce jour-là. Pour commencer, les pilotes de Tomcat n’étaient pas contents. Leur station n’avait pas été très active la veille. Et ils n’avaient pas vraiment envie d’être tous coincés là pendant trop longtemps non plus. Ils ont donc élaboré un plan.

Le Début De La Catastrophe

Le Début De La Catastrophe

Le plan américain

Larry Muczynski a expliqué : « En réalité, nous avions essayé de trouver des moyens de nous sortir de cette station afin d’être positionnés ailleurs. Ce que nous avions prévu, c’est qu’une fois notre réserve de carburant arrivée à ce qu’on appelle dans le jargon la charge de carburant de combat, nous appellerions des secours à la station, nous irions recharger le carburant au pétrolier, puis nous irions nous positionner sur une autre station.

Le Plan Américain

Le Plan Américain

Un intrus vient d’être repéré

Ainsi, après trois quarts d’heure de patrouille, les deux Tomcats étaient presque prêts à mettre leur plan en exécution. Mais ils ont par la suite repéré ce qui semblait être un intrus. Dave Venlet a vu un point sur son radar alors qu’ils surveillaient un aérodrome libyen. Quelque chose venait de décoller. En peu de temps, James Anderson voyait également la cible sur son écran.

Un Intrus Vient D’être Repéré

Un Intrus Vient D’être Repéré

Une situation effrayante

Les Libyens n’ont pas traîné ! Ils ont volé droit en direction des Tomcats. Ils ont propulsé leurs appareils jusqu’à 20 000 pieds, ce qui correspondait à la hauteur à laquelle les F-14 volaient. Peu de temps après, ils accéléraient jusqu’à atteindre 540 nœuds. Alors que Henry Kleemann et Larry Muczynski manœuvraient, les pilotes libyens collaient à leurs mouvements. Il était clair pour Larry Muczynski que ses adversaires étaient commandés par un contrôle au sol. Une situation effrayante !

Une Situation Effrayante

Une Situation Effrayante

Ils ne l’ont pas vu venir !

Il n’y avait aucun moyen pour les avions américains d’aller plus vite que les Libyens en vitesse de croisière. Ils ont donc engagé leur postcombustion au maximum. Les Tomcats volaient bientôt à 500 nœuds. Les deux ensembles d’avions se rapprochaient de plus en plus, quand quelque chose que les Américains n’avaient pas prévu s’est produit.

Ils N’ont Pas Vu Ça Venir !

Ils ne l’ont pas vu venir !